Décès dimanche matin en République dominicaine de la célèbre militante des droits des dominicains d’origine haïtienne, Sonia Pierre
Prise de malaise et transportée d’urgence à l’hôpital, Sonia Pierre a succombé à un arrêt cardiaque
Publié le dimanche 4 décembre 2011 / [jmd/Radio Kiskeya]
La militante des droits des dominicains d’origine haitienne et fondatrice du Mouvement des femmes dominico-haitiennes (MUDHA), Sonia Pierre, 48 ans, est décédée dimanche dans un centre hospitalier en République dominicaine suite à un arrêt cardiaque. Elle y avait été transportée d’urgence suite à un malaise.
Sonia Pierre avait déjà subi deux interventions chirurgicales pour les problèmes cardiaques dont elle soufrait depuis déjà quelque temps. Elle portait un « pace maker », selon certains de ses proches des milieux haitiens de défense des droits humains.
La militante des droits humains fut pendant longtemps la cible des milieux conservateurs et anti-haitiens dominicains qui ont toujours refusé de reconnaitre sa nationalité dominicaine et le bien-fondé de son plaidoyer en faveur de la dominicanité de nombreux descendants haitiens en territoire voisin.
Elle avait été récemment l’objet de sérieuses menaces de mort, à la veille de la décision de la Cour Suprême dominicaine La cour suprême dominicaine d’entériner une décision du gouvernement refusant la nationalité dominicaine aux enfants des descendants d’haïtiens nés en république dominicaine, alléguant que leurs parents sont en transit dans ce pays.
« Les enfants d’étrangers de passage en République Dominicaine nés dans ce pays, n’ont pas la nationalité dominicaine », selon la Cour suprême se référant à l’alinéa 1 de l’article 11 de la constitution dominicaine.
Sonia Pierre est née en 1963 en République dominicaine de parents haïtiens. elle était une des treize enfants de sa famille installée dans un batey (lieu d’habitation des coupeurs de canne haitiens, en grande majorité).
En 1976, à l’âge de 13 ans, elle organisa une manifestation de cinq jours avec les travailleurs de la canne à sucre dans un des bateyes de la République dominicaine, qui conduisit à son arrestation. Toutefois, la manifestation attira suffisamment l’attention du public pour que les revendications des travailleurs, à savoir, des locaux d’hébergement peint, de meilleurs outils et des augmentations de salaire, furent satisfaites.
En 2005, l’avocate Sonia Pierre demanda à la Cour interaméricaine des droits de l’homme de statuer sur le cas de deux enfants d’origine haïtienne qui se sont vu refuser un certificat de naissance dominicain. La Cour interaméricaine a confirmé les lois régissant les droits de l’homme et interdisant la discrimination raciale dans l’accès à la nationalité et à la citoyenneté. Le tribunal a également ordonné au gouvernement dominicain de fournir les certificats de naissance2.
En 2007, Sonia Pierre est elle-même menacée d’être déchue de la nationalité dominicaine. Le département d’inspection de la junte centrale électorale dominicaine ayant demandé par voie judiciaire l’annulation pour vice de forme de l’acte de naissance de Solain Pierre dite Sonia Pierre en raison de l’erreur relative à son patronyme.
En 1981, Sonia Pierre fonde le "Mouvement des femmes dominico-haïtiennes" (MUDHA) (en espagnol "El Movimiento de Mujeres Dominico-Haitiana"), une Organisation non gouvernementale qui contribuera à éveiller la conscience de l’opinion publique dominicaine et internationale sur le sort injuste et les conditions inhumaines réservées aux membres de la communauté haïtienne vivant en République dominicaine.
Pour son travail opiniâtre pour la défense de ses concitoyens d’origine haïtienne et plus généralement pour son combat pour les droits de l’homme, Sonia Pierre a reçu pour elle-même et pour son organisation (MUDHA), le Prix Robert F. Kennedy des droits de l’homme en 2006. Le prix lui fut remis par feu le sénateur Ted Kennedy qui déclara à cette occasion : "Avec certitude, je peux affirmer que Sonia est l’une des plus dévouées, courageuse et compatissante des êtres humains de ma génération. Sonia est tout en haut de ma liste d’héroïnes".