GARR (Groupe d’Appui aux Rapatriés et Refugiés)

Arrêt TC 168/13 : Le GARR maintient la mobilisation contre cette décision arbitraire et raciste

« République Dominicaine et sa politique migratoire anti-haïtienne : 2 ans après l’Arrêt TC 168-13, quel avenir pour les victimes ? », c’est autour de ce thème que le Groupe d’Appui aux Rapatriés et Réfugiés (GARR) a marqué le 2ème anniversaire de la sentence de la Cour constitutionnelle dominicaine, le 23 septembre 2015.

Exposition de photos de migrant(e)s victimes dans diverses villes de la République Dominicaine, musique engagée, témoignages et conférence-débat, telles ont été les activités réalisées dans les locaux du GARR.

Intervenant en la circonstance, le Président du Conseil d’Administration du GARR, Philippe Jean Thomas, estime nécessaire de maintenir la mobilisation contre cette décision discriminatoire et arbitraire. Il en a profité pour lancer un appel à la communauté internationale en vue de porter la République Dominicaine à faire retrait à cet arrêt.

«Cette décision xénophobe viole les droits humains des milliers de Dominicain(e)s d’ascendance étrangère qui se retrouvent pour l’instant apatrides. Nous devons continuer cette lutte. La communauté internationale doit agir aussi pour porter les autorités dominicaines à retourner sur cette décision discriminatoire et arbitraire.», a-t-il martelé.

Rapatriée le 2 juillet 2015 au point frontalier de Belladère et prise en charge par le GARR jusqu’à aujourd’hui, Nancy, 29 ans, est mère de 5 enfants. Elle a attiré l’attention des autorités haïtiennes sur les difficultés économiques auxquelles elle fait face pour répondre à ses besoins quotidiens et ceux de ses enfants.

« N’était-ce pas l’intervention du GARR, la faim m’aurait tuée avec mes enfants et nous aurions dormi à la belle étoile.», a-t-elle témoigné.

Retourné de la République voisine, le 17 juin 2015, Justin, 34 ans, est père également de 5 enfants. Il dit occuper le site d’hébergement du Parc Cadot depuis environ 3 mois. Le jeune migrant haïtien qui souhaiterait être relocalisé dignement, a réclamé une assistance des autorités haïtiennes en vue de prendre soin de ses enfants.

Un panel composé de militants (e)s de droits humains haïtiens et dominicains et d’un diplomate animaient aussi une conférence-débat lors de cette journée.

La Coordonnatrice du Département légal du Mouvement des Femmes Dominico-Haïtiennes (MUDHA), l’avocate dominicaine, Jenny Carolina Moron, intervenait sur le Fondement et analyse de la loi 169-14 (Loi Medina).

La militante dominicaine de droits humains qui s’est montrée préoccupée du dossier de l’Arrêt TC 168-13 et des rapatriements en cascade enregistrés à la frontière, a appelé les autorités haïtiennes à la vigilance au cours de la fin de l’année 2015.

« Vous devez être vigilants à partir du mois de décembre prochain. Car les autorités dominicaines utilisent souvent la période de Noël pour réaliser des rapatriements. Tandis que tout le monde se divertit.», a-t-elle souligné.

Présentant les caractéristiques de l’apatridie et ses conséquences, le Représentant du Haut Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (HCR), Soufiane Adjali, a exhorté les autorités dominicaines à trouver une solution à ce problème qui ne concerne que des Dominicain(e)s.

De son côté, Me Saint-Pierre Beaubrun, Coordonnateur du GARR qui intervenait sur l’apatridie au regard des lois haïtiennes, a montré que les gens dénationalisés ne sont pas des Haïtien (ne)s, d’après le Décret haïtien traitant de la nationalité du 8 novembre 1984.

« En vertu du Droit haïtien, nous pouvons signaler que ces Dominicains victimes de l’Arrêt TC 168-13 ne peuvent prétendre à la nationalité haïtienne, comme veut faire croire l’Etat dominicain.», a-t-il poursuivi.

Le juriste a attiré l’attention de tout un chacun sur l’inconstitutionnalité de la décision de la Cour constitutionnelle dominicaine violant notamment le principe universel de la non rétroactivité des lois.

L’Etat dominicain viole aussi l’article 15 de la Déclaration universelle des Droits de l’Homme en ses alinéas 1 et 2.

«Tout individu a droit à une nationalité. Nul ne peut être arbitrairement privé de sa nationalité, ni du droit de changer de nationalité.», a-t-il argüé.

L’ex-coordonnatrice du GARR, Colette Lespinasse, qui analysait le dialogue haïtiano-dominicain dans le contexte de rapatriement a invité les autorités des deux Etats de l’Île à poursuivre un dialogue binational basé sur la franchise et la justice sociale, comme l’ont déjà initié les artisans de paix et de solidarité se trouvant des deux côtés de la frontière.

La militante de droits humains a par ailleurs suggéré à l’Etat haïtien de prendre des mesures favorables aux migrant(e)s et aux petit(e)s commerçant(e)s transfrontaliers.

Soulignons que des représentants de la Primature et du Ministère des Affaires Etrangères et des Cultes, des représentant (e)s d’organisations de la société civile haïtienne et d’institutions membres du GARR, des partenaires de ladite organisation, des étudiants(e)s et professeurs d’universités de la capitale étaient présents à ladite activité.