80ème anniversaire du massacre des Haïtiens : Un devoir de mémoire pour harmoniser les relations entre les deux Etats de l’île

 

Conférence de presse, séance de bougies allumées, célébration de messe, marche pacifique, dépôt de gerbes, conférence-débats, prestations théâtrales, telles ont été entre autres les diverses activités réalisées, du 2 au 4 octobre 2017, à Ouanaminthe (Nord-est) par un collectif de citoyennes et de citoyens dénommé "Kolektif Komemorasyon Masak Kout Kouto". Ces activités visaient à marquer la date tragique du massacre de Perejil (Persil en Français) perpétré en octobre 1937 par le dictateur dominicain Rafael Leónidas Trujillo Molina. Environ 20,000 Haïtiens ont été tués.

 

La journée du 2 octobre 2017 a été marquée par la tenue d’une conférence de presse dans la matinée et l’organisation, à la tombée de la nuit, d’une séance de bougies allumées sur la place publique Notre-Dame de l’Assomption à Ouanaminthe en mémoire des victimes du massacre.

La séance de bougies allumées allait être suivie, le 3 octobre 2017, d’une une messe chantée à l’église Notre-Dame de l’Assomption de ladite commune par les révérends Stanley Casséus de nationalité haïtienne et Mario Serrano Marte de nationalité dominicaine.

Immédiatement après, plusieurs centaines de personnes ont marché pacifiquement de la rue Valière à la Rivière Massacre où est érigé le pont d’Ouanaminthe servant de limite entre Haïti et la République Dominicaine. C’est dans cette rivière, on se le rappelle, que nombre de ressortissants haïtiens ont rendu l’âme tandis qu’ils tentaient en vain de traverser la frontière de Dajabon/Ouanaminthe.

Des slogans de paix, d’harmonie et de remémoration ont été scandés tout au long du parcours des marcheuses et marcheurs.

Des gerbes ont été jetées dans la rivière en souvenir des victimes de ce massacre de trois jours. Des acteurs, dans le cadre du projet "Fwontyè San Fòs Kote", ont offert des prestations théâtrales pour dénoncer les violations de droits humains dont sont l’objet au quotidien les ressortissants haïtiens en République Dominicaine.

Jésula Blanc, responsable de plaidoyer au GARR qui intervenait en la circonstance, a appelé les autorités haïtiennes et dominicaines à travailler pour favoriser un climat de paix et d’harmonie entre les deux peuples de l’île en vue d’éviter la reproduction d’un tel événement lugubre.

Elle en a profité pour demander à l’Etat haïtien de travailler pour améliorer le sort de la population haïtienne de façon à l’inciter à rester en Haïti afin qu’elle n’aille pas se faire humilier en territoire dominicain.

De son côté, le directeur adjoint du Service Jésuite aux Migrants/Solidarite Fwontalye (SJM/SFw), Michel Edouard Alcimé dit souhaiter qu’Haïti ne revive jamais un triste événement. Il a plaidé en faveur du respect des droits humains entre les deux Républiques qui, selon lui, sont appelées à vivre ensemble.

Il convient de souligner que divers thèmes ont été aussi abordés le 4 octobre 2017 par des panélistes haïtiens et dominicains lors d’une conférence-débat.

Le Sociologue Smith Augustin qui analysait les origines sociales et politiques du massacre de 1937, a avancé que « les causes doivent être recherchées à partir d’un raisonnement psychologique individuel qui est en fait une expression morbide du complexe d’infériorité d’un dictateur cherchant à se débarrasser de son origine haïtienne ».

Le doctorant en sociologie à l’université Laval, au Canada, a par ailleurs avancé que «l’origine de cet événement tragique est beaucoup plus profonde et répond à une dynamique sociale et un projet politique de reconstruction nationale».

Le prêtre dominicain, Rejino Martinez, l’un des panélistes, a mis l’accent sur la nécessité pour les autorités des deux Etats insulaires de travailler pour l’établissement d’un dialogue binational franc et sincère qui débouchera sur le climat de paix et d’harmonie tant souhaité par les militants de droits humains des deux pays.

Organisées grâce au support du GARR, du SJM/SFw, d’Oxfam, d’OIM et de l’organisme britannique Christian Aid, ces activités commémoratives du massacre de 1937 visaient à dissiper tout sentiment de haine qui nuirait aux relations de bon voisinage entre les deux Etats insulaires.